Sur welovetennis (dont les interviews sont souvent intéressants), Claude Onesta parle de stratégie dans le passage suivant :

Q: "Avant le match contre la Croatie, on voit dans le documentaire consacré à l’équipe de France que vous avez intégré dans votre scénario de match l’idée de ne pas mener d’un trop grand écart à la mi-temps de peur que le public se déchaîne et se retourne contre vous..."
R: "Oui, alors il faut relativiser. Quand on fait des simulations et qu’elles se réalisent, on peut se trouver génial. Moi je sais que j’en ai fait tellement d’autres qui ne sont jamais réalisées que ça permet de relativiser (Sourires) C’est tellement gratifiant de se prendre pour un sorcier surtout quand on fait ce métier et qu’on est jeune. (Sourires) L’analyse qu’on a faite était juste tirée de notre expérience. On avait déjà vécu des situations analogues de public fanatisé, on avait déjà vu l’influence que ça pouvait avoir sur l’arbitrage, et on savait pertinemment que si on prenait immédiatement l’avantage sur cette équipe croate, on aurait à assurer la charge du match sur la durée. Or cette équipe croate qui est aussi forte que nous, à un moment elle trouverait forcément la solution et nous mettrait en difficultés. Et dans ces moments-là, avec un public qui a cru que le rêve était brisé, qui reprend goût à la vie et qui devient fou, vous avez une équipe qui se transcende, des arbitres sous pression, et le scénario parfait de la tempête. A l’inverse si on ne mène pas dans ce match mais si on reste au contact, dans un pays où la fête nationale est programmée à la seconde qui suit le coup de sifflet final, et que progressivement on commence à les faire douter, on peut se dire que non seulement le public va se crisper mais que les joueurs vont le sentir, sentir qu’ils sont peut-être en train de trahir tout un peuple, et on sait tous que le money-time nécessite toute sa lucidité. Si à ce moment-là ils ont la charge sur les épaules, ils vont difficilement atteindre l’efficacité. Donc l’idée c’est de les amener dans cette zone où l’élément favorable, le public, devienne un handicap et une pression pour eux. Mais je n’ai rien inventé, c’est juste ce qui semblait le plus rationnel."

Marrant, parce que ça vient précisément en écho de billets récents sur freakonomics : When losing leads to winning, appliqué au basket, et When Winning Leads to Winning: A Response, qui parle également de tennis.
Au basket , "teams that are behind by one point at halftime are actually more likely to win than teams that are one point ahead ...

Onesta encore :

"Je pense effectivement que la victoire est génératrice de défaites. C’est la logique même de l’observation : quelqu’un qui va gagner, c’est quelqu’un qui va être tout à coup envahi par l’émotion, le plaisir, la satisfaction, qui va donc être dans un environnement positif, tout le monde venant le féliciter. Ca veut dire que ça va générer une béatitude et comme on est tous construit comme ça, c’est rarement dans ces moments-là qu’on travaille le plus."
(...)
Q: "Mais comment le coach fait lui-même pour sortir de la béatitude ?"
R: Justement, le coach doit être celui qui est en décalage avec les évènements. Le coach c’est le poil à gratter quand tout le monde a perdu le sens de la réalité.

Ca enfonce des portes déjà grandes ouvertes, mais il est difficile de ne pas faire le lien avec ce qui peut se passer dans la tête d'un certain joueur suisse, actuel numéro deux mondial.