Interview de J.P Bourguignon, directeur de l'IHES, sur le blog sciences^2 de Libé :
"Il aurait fallu se pencher sur ces outils utilisés par les banques, les confronter aux données financières et économiques globales, étudier la stabilité du système financier mondial… Ce qui était impossible puisque les banques gardaient pour elles les données qu’elles collectaient dans un contexte de compétition féroce, d’égoïsme, et aussi d’aveuglement idéologique, d’absence de réflexion épistémologique et éthique. Bref, pour anticiper la crise au plan mathématique, il aurait fallu un partage des connaissances, une vue d’ensemble et la construction d’un sous-bassement théorique sérieux comme bien public."
He he, il y en a que ça doit bien faire marrer, ce doux rêve du partage des connaissances dans un milieu concurrentiel. Il faudrait que j'invite monsieur Bourguignon à voir comment ça se passe dans un des plus grands groupes industriels français, où même dans un contexte a priori non-concurrentiel, c'est-à-dire dans une entreprise où tout le monde est censé bosser dans la même direction, eh bien la connaissance avance à la vitesse d'un Choloepus didactylus sous régime hypocalorique, à cause d'une politique de gestion du savoir qui ne dépareillerait pas dans une république populaire démocratique. Un exemple simple ? Il existe une base de données des méthodologies utilisées par l'ingénierie, ingénierie qui, dans son volet opérationnel, est principalement mise en oeuvre par les prestataires. Or les prestataires n'ont ... PAS accès à cette base de données !
Etonnant, non ?
4 réactions
1 De Nicolas - 08/12/2009, 00:44
Hmm...
Sur le même sujet, tu avais vu le XKCD sur la différence recherche/industrie ? xkcd.com/664/
Je me demande cependant si le problème que tu décris n'est pas plus lié à la taille du groupe industriel et à sa culture, on va dire, du siècle dernier. J'avais eu l'impression que des boites plus petites (et plus informaticiennes, et plus américaines aussi...) partageaient mieux les connaissances. En interne, au moins.
2 De BB - 08/12/2009, 10:32
Si c'est la boite à laquelle je pense, ne t'inquiète pas, d'ici quelques années, cela sera accessible aux prestataires.
Le temps que les ingénieries comprennent qu'ils sont (ou vont être) dans la même situation que l'informatique...
3 De Eric - 08/12/2009, 11:36
@Nicolas,
Oui, je ne l'avais pas raté. Très bon :)
Pour revenir à mon client^Wgroupe industriel, clair que l'aspect structurel est important. Pourtant le recours à le sous-traitance est récent, et l'externalisation "physique" a eu pour conséquences, comme j'en avais déjà parlé, de les obliger à formaliser davantage les choses, en remisant la tradition orale au placard. Mais ça s'arrête là : dans les centres d'ingénierie distants, les exécutants ne reçoivent que LA méthodo unique, appliquée à leur problème, qui leur est transmise par leur interlocuteur. J'ai du mal à croire que l'argument de l'espionnage industriel justifie un tel bridage des connaissances. Surtout que, pour être lucide, à part quelques poignées de dizaines de personnes, généralement sises à la direction de la recherche, le niveau moyen de ce qui est réalisé par ailleurs est très "élémentaire". Et je suis poli.
@BB,
Mais non, m'enfin, où vas-tu chercher ça ? Je tiens simplement ce constat d'un informateur bien placé ... :)
4 De cédric - 30/12/2009, 00:20
Concernant les-dites méthodologies, c'est d'autant plus idiot qu'elles sont souvent élaborées par les prestataires, parfois de la même société que ceux censés l'utiliser...