Comme pas mal de monde je découvre depuis deux jours Didier Raoult, professeur spécialisé dans les maladies infectieuses tropicales émergentes à la faculté de médecine de Marseille, "expert mondial" comme il se plait à l'expliquer lui-même dans les trois premières minutes de cette vidéo : Chloroquine : pourquoi les Chinois se tromperaient-ils ? (28/02/2020)

Hier, des résultats positifs étaient annoncés : Coronavirus : le traitement à la chloroquine testé à Marseille serait efficace (16/03/2020)

Dans une vidéo de 18 minutes enregistrée devant ses étudiants à Marseille, le professeur Raoult ne cache pas sa satisfaction. Concrètement, 24 patients atteints par le coronavirus ont accepté de prendre du Plaquenil, l'un des noms commerciaux de la chloroquine. Six jours plus tard seulement, seulement 25 % sont encore porteurs du virus. Alors que 90 % ceux qui n'ont pas reçu ce traitement sont toujours positifs.

Devant la présentation de ces résultats, les étudiants applaudissent le professeur. "C'est spectaculaire, leur dit le directeur de l'IHU. La charge virale moyenne avec ce virus est normalement de 20 jours. Et tous les gens qui meurent à cause du corona ont encore le virus. Ne plus l'avoir, ça change le pronostic."

Comme d'habitude, les réseaux sociaux se divisent à une vitesse phénomènale entre les pro- et les anti-. On peut tenter un rapide bilan pour/contre :
Pour :

Contre :

  • dans la liste des 400 sus-mentionnée, il est n°2 en nombre de publications. Ca fait beaucoup 1252 publis, même s'il est en fin de carrière[1]. En revanche, en nombre de citations il n'est "qu'au" 194e rang ... Le décalage entre les deux est étrange.
  • un melon de 1e catégorie, il suffit de voir la 1e vidéo mise en lien, ou bien de lire cette tribune dans le Point en 2018 dans laquelle il regrettait que les meilleurs chercheurs ne soient pas suffisamment récompensés (a posteriori on peut avoir l'impression qu'il se met dans le lot ...) : De l'opéra et de la recherche

Tout comme les divas font les plus beaux opéras, ce sont les meilleurs chercheurs qui doivent être mis en avant en France. Or, l'excellence n'est pas récompensée. Pour diriger un opéra, il n'est pas nécessaire de bien savoir chanter, mais en revanche il faut aimer les divas, sinon il faut diriger une chorale. On ne choisit pas les divas, en faisant voter le chœur ni en faisant voter l'orchestre, les divas existent indépendamment des directeurs, et font passer le niveau d'une représentation de la banalité à l'excellence. Il en va de même de la recherche. Malheureusement en France, les unités de recherche, les postes de chercheurs dans les instituts, sont choisis par le « chœur », c'est-à-dire par des élus de tous niveaux qui décident, ce qui est une bonne unité de recherche et ce qui n'en est pas une.

Wait and see ...

Edit 21/03 : encore un entretien caricatural dans la Provence de ce samedi : "Je ne suis pas un outsider, je suis en avance"

(...) Le monde de l'information vit dans un monde parallèle au mien, celui de l'observation. On est passé d'une exagération à une déconnection. Il y a dans le monde 2,6 millions de morts d'infections respiratoires par an, vous imaginez que les 5 000, 10 000 ou même 100 000 vont changer les statistiques ?
On ne parle pas de statistiques, on parle d'êtres humains, de populations entières confinées...
De quoi voulez-vous parler d'autres ? Les gens meurent, oui. La plus grande surmortalité de ces dernières années en France, c'était en 2017 : 10 000 morts supplémentaires en hiver, on ne sait pas même pas si c'est de la grippe. 10 000 morts, c'est beaucoup. Mais là, on en est à moins de 500. On va voir si on arrive à en tuer 10 000, mais ça m'étonnerait.
(...) La seule chose qui m'intéresse sont les datas, les données brutes. Les données vont rester, les opinions, elles, changent... Je ne dis pas l'avenir, mais je ne suis absolument pas terrifié.
(...) Les Japonais ont fait un très beau modèle expérimental en confinant les croisiéristes assez âgés sur le Diamond Princess. On a bien vu que c'était contagieux, 700 l'ont chopé. Mais en dépit d'une population très fragile, il n'y a eu qu'1 % qui sont morts. C'est la réalité observée. Quand il y aura 1 000 morts dans l'Est, je dirai oui, c'est grave.
Ce n'est pas parce qu'il y a quelques personnes qui pensent certaines choses à Paris, que je suis à contre-courant. Dans mon monde, je suis une star mondiale, je ne suis pas du tout à contre-courant. Je fais de la science, pas de la politique. Les maladies infectieuses, ce n'est pas très compliqué, c'est diagnostic et traitement. C'est le B-A ba, si les gens ne connaissent pas le B-A ba des maladies infectieuses ou de la chloroquine qui s'apprend en troisième année de médecine, je n'y peux rien. Je vais pas refaire l'éducation de ceux qui refont le monde sur les plateaux-télé. Je me fous de ce que pensent les autres. Je ne suis pas un outsider, je suis celui qui est le plus en avance.

Note

[1] comme se le demande la rédaction médicale dans le billet déjà mis en lien, "Est-il possible de publier 1 252 articles sans plagiat, LPU, et autres manipulations ?