De Jean Dubois, sur tanstaafl-fr.com :

Le chômage peut très certainement être aggravé par l’intervention des Etats dans les contrats libres entre individus. Un salaire minimum ou des lois qui empêchent de licencier ont très certainement un impact négatif sur la création (et la destruction) d’emploi. Mais à nouveau ce serait une erreur de croire qu’il s’agit là de la « cause » du chômage. Les lois sociales existent dans tous les pays et ce ne sont pas les pays qui en sont dépourvus (les pays en développement) qui sont les pays qui se portent le mieux. Le chômage y est plus élevé que dans les économies du Nord de l’Europe qui ont su se débarrasser en grande partie du chômage tout en renforçant un système social très avantageux. Des lois idiotes peuvent bloquer les transactions, retarder les embauches, mettre certaines catégories de la population temporairement au chômage. Mais elles ne peuvent créer un chômage de masse durable. Car une économie de marché par définition s’adapte aux circonstances.
[...]
Un emploi c’est rendre service à la société. Le chômage peut dès lors s’interpréter comme la volonté consciente ou non d’un grand nombre d’individus de ne pas s’investir dans la vie de la société et de ne pas se mettre à son service en échange d’un salaire. Ou autre manière de dire finalement la même chose, d’un décalage entre les aspirations à l’emploi et les emplois effectivement offerts. Le chômage naît de ce décalage entre l’emploi rêvé et la réalité du marché du travail, entre les utopies cultivées à l’école, dans les quartiers, en famille, dans l’intelligentsia et un monde plus basique qui est celui des besoins matériels quotidiens.


Quelques jours après, on peut lire ceci sur le blog de L. Le Meur :

La solution est pourtant simple, étudiez, apprenez, défoncez-vous ailleurs que dans la rue et vous verrez, ce sont ces fameux patrons diaboliques qui seront précaires en craignant de vous voir partir dans une autre entreprise, peut-être même la votre, qui sait.

... Ou quand deux opinions manifestement libérales arrivent à se contredire de manière flagrante ...
Non Loïc, il n'y a pas la place en France pour 700 000 cadres sup et autres diplômés de grandes écoles tous les ans. C'est une utopie que de croire cela. Comme le sous-entend Jean Dubois, et je ne suis pas loin de partager son avis, il faut aussi 3000 serveurs de restaurants, 12000 agents de maitrise dans l'industrie, 2000 caissières en grande surface, et les étudiants en maitrise de psycho à qui on propose ces jobs ne sont pas prêts à les accepter, parce qu'on leur a fait croire trop longtemps qu'ils pourraient envisager autre chose !
Lire à ce sujet le billet d'Alexandre Delaigue sur Econoclaste :

Dans le modèle du signal, par contre, le résultat est différent. Si le nombre d'années d'études est pour un individu un moyen de signaler des capacités à un employeur, l'éducation est un bien positionnel : l'essentiel n'est pas d'en avoir le bon nombre, l'essentiel est d'en avoir plus que les autres. Dans cette perspective, il est intéressant individuellement de rallonger ses études, puisque cela permet de se distinguer des autres; mais socialement, ce n'est pas la même chose. L'individu qui se forme plus que les autres génère une externalité : il oblige les autres, s'ils veulent rester dans la course, à se former plus à leur tour. Il se crée une course aux armements : finalement, tout le monde se forme plus, mais les positions relatives de chacun restent inchangées.

Je ne suis juste pas d'accord avec la "conclusion" que tire Alexandre de ce paragraphe :

Est-ce un problème? Pas forcément. Après tout, si l'on cherche à réconcilier la logique du capital humain et celle du signal, on peut trouver dans cette "course aux armements" un mécanisme finalement positif, qui incite chacun à se former et finalement bénéficie à la collectivité.

Je crains au contraire que cette course à l'armement ne conduise seulement à une augmentation de la "frustration moyenne par individu" : plus on promet de choses à un étudiant, en lui assurant que son statut professionnel futur sera en rapport avec la manière dont il s'est défoncé pendant son cursus, et plus sa frustration sera grande s'il ne récolte à l'arrivée que précarité et petits boulots dévalorisés à ses yeux.