Mardi, les prévisions pour mercredi soir se confirment, il ne fera pas beau sur Paris. Ca serait donc dommage de se retrouver sous la flotte, même si c'est en terrasse aux Jardins de Bagatelle. Donc je cherche une solution de repli. Un bon resto thaï ? Mhhh, je dégaine mon Lebey, et commence à en parcourir les pages. Fermé en août, fermé en août, fermé trois semaines en août ... Bon, ok, changement de stratégie. Ramulaud ? Argh, fermé aussi[1]. L'Enoteca ? Itou. L'Avant-Goût ? Pas mieux. Une heure et quelques coups de fil plus tard, je tombe sur un des 212 restos qui nous restent à essayer sur Paname, mais un des trois seuls qui semblent encore ouvert à cette période de l'année : Ze Kitchen Galerie [2]. Forcément, avec un nom pareil, c'est en fin d'index ...



Cuisine réputée inventive, fortement inspirée par l'Asie du sud-est, jouant sur les mélanges sucré-salé. Ca méritait un coup d'essai.
La carte propose un menu-découverte à 70 zorros, sinon c'est 55€ pour entrée-plat-dessert (à 2 ou 3€ près les entrées sont à 15, les plats à 30 et les desserts à 10). Carte des vins pas donnée non plus, pas de bouteilles à moins de 25€, mais une très belle sélection (à vue de nez une quarantaine de références en tout), avec un coef moyen qui doit se situer à 4.
La couleur est vite trouvée compte tenu des plats choisis (difficile d'y placer du rouge), mais le nom du vigneron plus difficile à sortir du chapeau (Laïs de chez Olivier Pithon ? Ou un vin d'André Ostertag ? Son pinot ou son riesling Muenchberg ?). C'est finalement le blanc (cuvée Galets Dorés) 2006 de Mourgues du Grès (salut Marc !) qui nous accompagnera pendant le repas.
La salle est un peu bruyante, la déco élégante et sobre à la nuance près que les murs sont bêtement couverts d'oeuvres cataloguées sous la rubrique Art Contemporain. On pourra épiloguer tant qu'on veut sur la manière de définir l'art, personnellement je le vois davantage dans l'assiette que sur ces maladroits coups de pinceaux. Tant mieux, on était aussi installés juste à côté de la baie vitrée qui donne sur la cuisine, et c'est bien plus intéressant à regarder ...

Tourteaux-crevettes, haricots verts, pomme verte, condiments tarama et mangue-citronnelle.
Trois quenelles de miettes de crustacés servant d'appui à des tipis formés par les haricots, sur lesquels reposent des tranches de granny smith. Le jeu c'est évidemment d'essayer de décrypter les saveurs qui se bousculent. Coriandre. Les haricots sont croquants, très fins. Dur de parvenir à associer tous les éléments du plat dans une même bouchée. Le tarama est très crémeux, habilement allongé pour ne pas dominer. La mangue verte était présente dans l'intitulé de nombreux plats, ce qui m'a au début laissé me persuader que le deuxième condiment était un coulis de mangue, juste citronné, d'autant qu'il était d'un jaune pétant. L. me dit que c'est de la citronnelle qui figurait sur la carte. J'ai bien de la citronnelle en tête, mais plutôt dans les quenelles de crustacés. Etonnant[3]. Les saveurs se multiplient, c'est goûteux, mais ça manque peut-être un poil de simplicité, de netteté. Très bien quand même :)

Cailles rôties, jus teryaki, nectarines et oignons rouges en marmelade. Les cailles sont caramélisées, la sauce puissante (jus de volaille brun, typé aigre-doux ; l'influence asiatique est évidente). On est plus dans le démonstratif que dans la subtilité, mais l'accord marche très bien quand on parvient à mettre un peu de tout dans sa fourchette :) Le vin, servi bien trop froid, commence à retrouver une température plus décente, et s'accomode sans forcer de la richesse du plat.

Fondant abricot, sorbet griotte, curcuma et coulis d'abricot. Bel équilibre dans ce dessert, avec un petit moelleux à l'abricot très tendre, relevé par un "jus au curcuma" qui apporte la touche d'exotisme attendue. Le sorbet est délicieux. Encore une fois, il faut prendre soin de tout réunir pour profiter au mieux des accords. Ca semble être une constante de la cuisine de William Ledeuil, avec en contrepoint le risque d'être "dépassé" par la multiplicité des saveurs. Les amateurs de cuisine épurée n'y trouveront peut-être pas leur compte, mais c'est à mon sens une adresse qui mérite le détour ...

Notes

[1] en plus j'apprends grâce au blog de Caroline Mignot que l'équipe a changé

[2] avec une interview de son chef William Ledeuil sur Thym Citron

[3] j'ai appelé le restaurant pour confirmer, on avait tous les deux raison, c'était mangue-citronnelle