Quelqu'un a-t-il lu le rapport Stern ? Tout le monde en parle, mais qui l'a lu ? Je reformule ma question : qui a lu les 600 pages du rapport complet, sans se contenter du résumé ?
Pas grand monde, je crois. Hop, c'est parti :
1. La science du changement climatique
Depuis l'ère pré-industrielle (~ 1750), la concentration en CO2 a augmenté d'un tiers, passant de 280 à 380 ppm. La concentration d'autres gaz à effet de serre, comme le méthane ou les oxydes nitreux, a également augmenté sur cette période.
L'effet de l'ensemble de ces gaz est équivalent à une concentration en CO2 de 430 ppm (on parle de "CO2-equivalent", ou CO2e). L'incertitude sur ces niveaux est de l'ordre de 10% (cf. chapitre 1, p. 4).
Cette concentration équivalente augmente au taux de 2.3 ppm par an (moyenne 1980-2004, d'après les données de Shine and Gohar, Univ. of Reading - cf. chapitre 1, p. 3).
Les températures moyennes à la surface du globe ont augmenté au cours du dernier siècle, d'environ 0.7° depuis 1900. Sur les trente dernières années, l'augmentation est continue et atteint 0.2° par décennie (ndlr : 0.2° par décennie ça fait 0.6° sur 30 ans, ce qui laisse peu de place pour les 0.7° observés en un siècle)
On peut se demander si cette augmentation est sans précédent ou bien si elle se situe dans une plage "explicable" par les variations naturelles. Cette question a été, et est toujours, au centre d'un débat nourri. Mais les arguments en faveur du changement climatique ne s'appuient pas sur ce seul point.
L'effet de serre est un phénomène naturel qui permet à la surface de la Terre d'être environ 30° plus chaude qu'elle ne le serait en son absence. La compréhension de cet effet remonte au 19è siècle, grâce aux travaux de Fourier, Tyndall et Arrhenius notamment. Tyndall a identifié les molécules (principalement le dioxyde de carbone et la vapeur d'eau) qui jouent le rôle de piège à chaleur. Depuis lors, le perfectionnement des modèles a permis de quantifier l'influence de la concentration en CO2. Un calcul simple sur la base d'équilibres énergétiques permet d'affirmer qu'un doublement de la concentration en CO2 conduit à une augmentation moyenne de 1°. Mais la réalité est plus complexe du fait des interactions et couplages multiples. (je relève une phrase bien précise du rapport : "It is currently impossible to pinpoint the exact change in temperature that will be associated with a level of greenhouse gases", chap.1, p.7).
Les différents modèles climatiques actuellement disponibles montrent qu'un doublement de la concentration en CO2 pourrait conduire à une augmentation de température comprise entre +1.5° et +4.5°C. Les modèles les plus récents laissent en outre penser que le climat pourrait être encore plus sensible aux niveaux de CO2, avec une probabilité comprise entre 2 et 20% que l'augmentation de température soit supérieure à 5°C (chap.1, p.9).
Le changement climatique est en outre susceptible de déclencher d'autres phénomènes conduisant à l'émission de gaz à effet de serre supplémentaires. C'est par exemple le cas de la fonte du permafrost, qui pourrait dégager de grandes quantités de méthane (et de CO2), amplifiant ainsi les conséquences du réchauffement (les émissions de méthane ont ainsi augmenté de 60% en Sibérie depuis le milieu des années 70). L'assèchement des terres marécageuses est également susceptible d'affaiblir l'efficacité de ces "pièges à carbone" : la masse d'équivalent-CO2 stocké dans les marécages et le permafrost est estimée respectivement à 1600 et 1500 milliards de tonnes (soit au total le double des émissions cumulées à ce jour issues de la combustion de carburants fossiles, cf. chap.1 p.11). Enfin les océans contiennent pour leur part des dizaines de tératonnes (ndlr : téra = 10^12 = billion au sens français = mille milliards ... feat. captain Haddock) d'hydrates de méthane. Sous l'effet du réchauffement une partie de ceux-ci pourrait devenir instable et être relâchés dans l'atmosphère.
La compréhension de ces effets est pour l'instant insuffisante, et rares sont les modèles qui les intègrent. Des études préliminaires suggèrent que l'augmentation de température liée à ces phénomènes de "rétroaction positive" serait de l'ordre de 1 à 2° d'ici 2100. La question se pose encore de savoir s'il y a un risque que le réchauffement s'auto-perpétue (ndlr : rendant le système instable ?).
Ci-dessous un tableau qui synthétise les perspectives déduites des différentes modélisations, selon la concentration (stabilisée) en CO2-équivalent :
Dans ce chapitre on n'a pour le moment considéré que les évolutions de température moyennes sur le globe. Or les régions continentales et situées à des latitudes élevées connaitront des variations significativement plus importantes que le reste de la planète. Pour un réchauffement moyen de 4°, on peut considérer que les océans et les régions côtières augmenteront de 3°, alors que l'évolution sera de l'ordre de 8° aux pôles.
Les changements de répartition de la pluviométrie et les évènements climatiques extrêmes impacteront davantage les populations que le seul réchauffement. Une augmentation de la pluviométrie est attendue sous les hautes latitudes, alors que les zones subtropicales auront plutôt tendance à s'assécher.
Le changement climatique pourrait provoquer un ralentissement de la circulation thermohaline (dont le Gulf Stream est une des manifestations), ce qui conduirait à un refroidissement localisé en Europe occidentale et sur la facade atlantique de l'Amérique du nord.
Chapitres suivants :
5 réactions
1 De Pinus - 07/11/2006, 10:10
Toi, bientôt, dans moins de 30 semaines, t'auras plus le temps de t'intéresser à tout ça !!!! ;-)
2 De Eric C. - 07/11/2006, 11:14
Justement, j'en profite !
3 De Krysztof von Murphy - 08/11/2006, 10:25
L'un des derniers _Pour la Science_ parlait du rôle très surestimé du Gulf Stream dans le réchauffement relatif de l'Europe. Il servirait plus à transférer de la chaleur entre la zone équatoriale et la zone autour de 45° de latitude, et son arrêt serait effectivement perturbant. Mais l'Europe devrait son climat clément plutôt aux vents, et le rôle des Montagnes Rocheuses serait capital.
4 De depresle - 29/11/2006, 13:12
bonjour,
je souhaite lire ces 600 pages mais en francais!ce rapport est il traduit ,si oui , où peut on se le procurer ?
MERCI
5 De mocona47 - 21/04/2007, 16:21
Je vais mettre le rapport STERN en français sur mon site www.geocities.com/non_gaspillage.
Voter bien SVP. Ni à droite ni à gauche.