Krysztof évoquait la semaine dernière une solution simple pour réduire l'insécurité routière : disposer une pointe acérée sur le volant, dirigée vers le conducteur, devrait suffire à pousser ce dernier à mieux conduire.
Cette idée était reprise il y a quelques jours, toujours sur le mode de la dérision (je préfère préciser, vu le niveau moyen des requêtes sur Google ...), par Steven Levitt, en conclusion d'un billet dans lequel il manifestait sa perplexité vis-à-vis de la thèse de l'homéostasie du risque. Egalement connue outre-Atlantique sous le nom d'effet Peltzman, il s'agit de la tendance qu'auraient les individus à fonctionner "à niveau de risque (perçu) constant". En clair, si vous vous sentez protégés par un dispositif (passif, comme la ceinture, ou actif, comme l'ABS), vous aurez tendance à "compenser" en adoptant une conduite plus risquée.
J'ai déjà entendu cet argument à plusieurs reprises, notamment à propos de l'impact sur l'accidentologie de la généralisation de l'ABS sur les voitures (et -encore trop lentement- sur les motos). Une légende urbaine tenace réapparait régulièrement, notamment sur fr.rec.moto, selon laquelle les conducteurs dont les véhicules sont équipés d'ABS auraient plus d'accidents que les autres.
Je crois, effectivement, que l'ABS peut avoir des effets pervers. Que certains conducteurs imaginent que ce garde-fou électronique est capable d'outrepasser les lois de la physique, et finissent par modifier leurs habitudes de conduite. Mais, comme Levitt à propos de la ceinture, je pense que le bilan reste malgré tout positif, que l'effet marginal d'augmentation des comportements à risque ne réduit pas à néant les gains "de premier ordre".